Entretien de la plateforme Citizen Lab avec Mariata Lam, économiste de formation, féministe, et membre de l’Initiative pour la Santé de la Reproduction (ISR) et de Voix des Femmes, point focal de la campagne Compter pour Toutes. Elle nous parle de l’atelier multi-acteurs sur les données probantes tenu récemment à Nouakchott.
Citizen Lab Mauritanie : En quoi consiste la campagne #CompterPourToutes ?
Mariata Lam : Compter Pour Toutes est une campagne de plaidoyer régionale qui réunit huit pays d’Afrique de l’Ouest francophone autour d’une mobilisation sociale et politique. Son objectif est d’influencer les pouvoirs publics nationaux afin d’obtenir une ligne budgétaire dans les lois de finances, permettant ainsi aux différentes organisations qui luttent en faveur des DSSR (Droits et Santé Sexuels et Reproductifs) et contre les VSS (Violences Sexuelles et Sexistes) d’avoir accès à des données nationales et probantes.
De plus, cette campagne est dédiée à la mise en place et/ou à l’amélioration des systèmes de collecte de données quantitatives et qualitatives relatives aux violences sexistes et sexuelles.
Citizen Lab Mauritanie : Quel était l’objectif de l’atelier multi-acteurs ?
Mariata Lam : L’objectif de l’atelier multi-acteurs était de réunir les professionnels qui travaillent dans la prise en charge des victimes, les acteurs de la société civile, et les partenaires techniques autour de la question, afin d’identifier leurs besoins par rapport au manque de données qualitatives et quantitatives.
Lors de cet atelier, nous leur avons présenté le projet et avons ensuite collecté des données pour établir un état des lieux. Cela servira à alimenter un document de plaidoyer qui sera ensuite présenté à certains représentants du gouvernement, afin de les mobiliser pour soutenir le plaidoyer en vue d’obtenir gain de cause.
Citizen Lab Mauritanie : Quelles sont les recommandations de cet atelier ?
Mariata Lam : Les principales conclusions et recommandations de cet atelier soulignent la nécessité de renforcer les capacités de collecte et d’analyse des données, de mettre en place des systèmes intégrés de suivi et d’évaluation, et de promouvoir une collaboration accrue entre les parties prenantes :
– Renforcement des capacités de collecte de données : Il est impératif de développer des capacités locales pour la collecte et l’analyse de données quantitatives et qualitatives. Cela inclut la formation des personnels et l’acquisition d’outils appropriés.
– Mise en place de systèmes de suivi et d’évaluation : Nous recommandons la création de systèmes intégrés de suivi et d’évaluation pour assurer la collecte continue et l’utilisation efficace des données.
– Promotion de la collaboration : Encourager une collaboration renforcée entre les différentes parties prenantes, y compris les organisations gouvernementales, les ONG et les institutions internationales, pour partager les données et les meilleures pratiques.
Citizen Lab Mauritanie : Quels sont les défis majeurs de la Mauritanie par rapport à l’accès aux données sur les violences faites aux filles et aux femmes ?
Mariata Lam : Les défis actuels résident dans la nécessité de disposer de données récentes et centralisées. En effet, les organisations de la société civile telles que l’AFCF (Association des Femmes Chefs de Familles) et l’AMSME (Association Mauritanienne pour la Santé de la Mère et de l’Enfant), qui collaborent avec les USPEC (Unités de Prise en Charge), réalisent un travail remarquable dans la prise en charge des victimes. Toutefois, ces données ne sont pas centralisées avec celles de l’ANSADE (Agence Nationale de Statistique et d’Analyse Démographique). Il est donc plus que nécessaire que nos États investissent dans la collecte des données.
Propos recueillis par Djiefoulbé Ba